Une voie perdue

Embral atteignit l'auberge avant que l'ombre de la nuit ne fusse complète. Il avait dans la tête des idées, des réflexions aussi ténébreuse que le drap de soie bleue marine qui recouvrait délicatement le ciel. Dans son esprit, une voix tranquille et profonde lui susurrait des mots de réconforts et d'appui. C'était sa mère. De son vivant, elle n'aurait pas souhaité la vie que menait ainsi Embral. A présent éteinte, mais veillant constamment sur son fils, elle ne différenciait plus les bons choix et les mauvais. Embral était seul maître de son destin, et elle ne pouvait que l'appuyer. Tandis qu'il écoutait les douces paroles maternelles, une autre voix prit brusquement part à l'échange. C'était sa propre voix.

- Je ne veux pas te décevoir, mère... s'étranglait-il en fixant le visage serein d'Ornella. J'ai ce sentiment amer de trahir ta chair en offrant mon cœur à la foi de la solitude, à la voie du meurtre.

C'est ainsi qu'il s'apprêtait à ouvrir la porte de la gargote, l'estomac dans les talons.

La ville d'Uden semblait bien calme et c'est en ce début de nuit fraîche que le jeune voleur pénétra l'auberge qui pour lui faisait office de deuxième logis.En le voyant l'aubergiste se mit à sourire.

- Ah ! Et dire que j'ai cru que vous ne reviendrez pas. Quelque chose vous ferait plaisir ? Avec la nuit arrive souvent le froid et pour bien dormir il faut bien manger ! plaisanta-il avant de jeter un coup d’œil au reste de la salle toujours aussi bondée.

Plongé dans ses pensées, Embral resta indifférent aux plaisanteries de l'aubergiste. Devant les escaliers, son ventre s'exprima à nouveau ; il revint à la réalité. Il se retourna alors vers son interlocuteur et lui confirma qu'il descendrait bientôt se restaurer, sans plus de précision.
Puis son regard parcourut les foules attablées autour de lui. L'odeur du vin lui montait à la tête, le fumet de la viande lui creusa l'estomac. Un être invisible vint lui chuchoter doucement à l'oreille.

Allons reprends-toi, tu as d'autres choses à régler, plus importantes que de satisfaire ton appétit, pour le plaisir d'un vieil aubergiste naïf et calorique.

Mais le voleur avait cet homme en sympathie, il lui adressa une grimace reconnaissante. Observant à nouveau les escaliers, il fronça les sourcils.

Quelle honte de ta part, toi qui n'a jamais su mettre de l'ordre dans ses idées. N'insultes pas cet homme dans son dos, j'ai besoin de lui. Je crois que toi aussi...

Devant la grimace du jeune voleur l'aubergiste haussa les épaules en souriant et repris son service. Embral devait se reposer, demain la journée s'annoncait longue et rythmée.

- Embral ? lança Nathil.

La femme était en haut des escaliers, son sourire radieux n'arrivait cependant pas à cacher toute la tristesse qui habitait son coeur brisée.

- J'ai entendu ta voix, tu vas bien ?

- Nathil...

Le jeune homme rejoignit son amie à l'étage, et acquiesça.

- Je vais bien. Mais toi ? T'es-tu reposée, tout ce temps ?

Comme le voleur s'apprêtait à lui raconter ses aventures au Bastion et son enrôlement récent au sein de l'armée. Il n'avait pas encore décidé comment le lui annoncer, et s'il devrait omettre ou non de mentionner "assassinat". Il devrait certes choisir ses mots avec soin. Ne pas parler trop fort... si possible dans un lieu désert. En somme, partout sauf dans cette auberge !

Nathil esquissa un petit sourire.

- J'essaye d'apaiser en moi la lourde peine qui m'accable. Néanmoins de te savoir de retour me rempli le cœur de joie.

Après un grand bâillement, la douce femme s'excusa et regagna sa chambre. La nuit était tombée et alors que le vent semblait se lever Embral put sentir monter en lui une sensation de fatigue. Il était temps d'aller se coucher...

Lorsqu'Embral se réveilla, le lendemain matin, il se sentait bien reposé. Depuis son retour à l'auberge, la soirée de la veille avait été très rapide. Nathil et lui avait mangé, bu et discuté, puis s'étaient couchés avant le milieu de la nuit.
Il était pourtant tôt, ce matin-là, quand Embral se vêtit d'une cuirasse légère qu'il pensa nécessaire à son entraînement, puis se couvrit d'un grand manteau noir. Il en tira le capuchon sur sa tête et accrocha une dague à sa ceinture. Enfin il était prêt ; en silence il quitta sa chambre et s'apprêta à descendre les escaliers.

Les cieux avaient entièrement guérit de l'orage qui quelques heures plus tôt le déchirait d'éclair d'une violence étrange. Dans l'auberge un calme régnait agréablement alors que des petites fenêtres le soleil brillaient.

- Je vous attendais.

Nikolaï, l'assassin royal, était adossé contre le mur adjacent à la porte de la chambre du jeune voleur. A l’inverse de la veille il était enchâssé dans une armure de cuir noir et de plaques d'acier intégralement gravées d'inscriptions elfiques.

- Tu es bien reposé ?

Étonné de déjà voir son maître devant lui, Embral ravala néanmoins une exclamation de stupeur. Cette apparition inattendue (^^) ne posait certes pas de réel problème : l'apprenti n'avait ni faim, ni soif. Il regarda autour de lui, puis dégaina une dague de son fourreau.

-Je suis prêt. siffla-t-il entre ses dents.

Comme premier entraînement, le voleur s'attendait plutôt à une sorte de test physique, quelque chose de peu concret, dans le but de voir ses limites. Une pensée lui vint à l'esprit : il était encore à l'auberge.

-Où irons-nous ?

Embral ne semblait pas tout à fait concevoir le sérieux de cette première journée. Il était enthousiaste, mais parlait trop...

Nikolaï frappa ses mains une unique fois dans un grand sourire : il était enchanté de voir l'enthousiasme de son disciple. Embral venait de fouler son premier pas sur la route du meurtre et des spectres.

- Nous allons marcher un peu dans les rues, l'heure où tu combattras n'arriveras que si tu sais te fondre dans la masse, passer près de quelqu'un sans qu'il ne le sache et pourquoi pas au passage lui faire les poches.

L'assassin fit à Embral un petit clin d’œil. Tout sortir dans la ruelle devant l'auberge sous l’œil attentif de Nathil, l'air quelque peu inquiète derrière sa fenêtre.
Les deux hommes prirent alors la ruelle et déboulèrent dans une rue qui à cette heure matinale était surtout arpentée de marchands et autres citadins se dirigeant vers la grand place pour y acheter leur pain quotidien.

- Ton premier exercice consistera en ce que nous appelons la furtivité. La magie peut te rendre invisible mais un assassin peut faire plus, il peut se faire oublier des regards. Marche parmi la petite foule, je te suivrais de loin. Et pendant que tu marcheras je veux que tu te frayes un chemin sans qu'aucun regard ne te vois !


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[Tu es libre de décrire ce que tu veux pour réussir cette mission à l'unique condition que ton message devra faire minimum 20 lignes pleines.Cette mission offrira à Embral son premier sort.]

Tu as eu tord de me laisser décrire tout ! Parce que je ne me suis pas gêne pour le coup !

L'hiver avait transformé les ruesd'Uden. Du haut de son balcon, un vieil homme prenait l'air en regardant le fond du boulevard. Les quelques passants, indistinctsdans la brume matinale, semblaient attirés vers un regroupement comme des moustiques par la lumière. Sauf que ce jour-là, il n'y avait guère de lumière. Le ciel était gris, maussade, sans expression.

Embral s'engagea dans la rue. Il pouvait facilement percevoir des cris s'élevant du rassemblement dans le boulevard, et courant le long des maisons. Le voleur rabattit son capuchon gris, et fonça vers un étalage ou s'amassaient hommes et femmes. Il reconnaissait ces cris, les clameurs de joie lors des nouveaux arrivages. Alors, se dressant dans la ruelle blafarde telle une tâche d'encre, Embral s'empara de trois pommes. En un éclair, il en plaça une dans sa poche, une dans sa manche et l'autre dans sa main droite. Il se glissa derrière le dos d'un jeune homme, et dos à dos, passa son bras gauche sous celui de sa victime de façon à le tenir contre son dos. Il glissa la pomme dans la main droite de sa marionnette. Il s'avança alors, droit devant lui, tirant le jeune homme stupéfait derrière lui, dans un premier temps, puis le laissant s'étaler sur les dalles.

Embral avait ainsi attiré l'attention sur lui, et plus spécialement sur le vol du jeune homme, qu'il venait de dénoncer par la même occasion. Jurant et crachant des accusations, il se saisit de la pomme que tenait sa marionnette, et l'apporta au marchand.

-Voici les deux pommes qu'on vous a volé. Avec tout mon respect, prenez donc un peu plus garde aux voleurs ! Ils sont nombreux par ici...

S'en retournant loin de la foule, et emportant au passage une pomme de l'étalage comme juste compensation de ses efforts, Embral s'en retourna vers son maître. Il avait rendu la pomme de sa main droite, et celle de sa manche gauche. Et il avait volé... en préférant faire émeute, car dans l'agitation l'action était simplifiée. Il savait par expérience que le vol n'était pas chose simple, et que certains voleurs s'étaient retrouvés les deux mains coupées. Il sortit la troisième pomme de sa poche et la lança à son maître, et garda la dernière.

-Petit déjeuner !

Nikolaï attrapa la pomme dans un enthousiasme aucunement dissimulé. Il finit même par applaudir devant la performance de son jeune disciple.

- Je vois que tu sais maîtriser le vole avec talent. La diversion et le subterfuge sont d’excellentes armes. Je considère que tu as réussi ta mission mais hélas certaines personnes t'ont remarqué et de ce fait tu devras passer une tout autre épreuve. Je veux que tu cours à travers cette foule mais personne ne devra te regarder, concentre ton esprit pour qu'aucun regard ne se pose sur toi !

[Embral gagne un nouveau sort consultable dans ta fiche de RP]

Et Embral ne se fit pas prier deux fois. Il s'avança dans un coin de la rue et se tint là quelques instants à réfléchir. Et brusquement il s'élança. Un pas, puis deux... Lentement, il marcha, regardant ses pieds, cherchant à paraître le plus naturel possible. Il cherchait, cherchait dans son esprit une raison pour laquelle personne ne le regarderait, mais ne trouvait rien de concret... Alors il avançait, comme à tâtons, priant la chance de lui venir en aide une fois de plus.
La chance n'était cependant pas le but de son exercice. Il aurait besoin de plus d'imagination et de réflexion à présent.