Cimetière

Yaröd d'un pas lent entra dans le cimetière après quelques instants de marche depuis les catacombes. Il regardait autour de lui avant de se figer sur place, le visage dans l'ombre mais les yeux illuminés par ses pensées profondes.

Cimetière, lieu de passage non pas de l'âme mais du corps, la fin d'une vie et le départ d'une nouvelle.

Yaröd était figé là, au milieu d'un Cimetière où se déroulait quelques combats tous plus atroces les uns que les autres.
Un léger nuage de fumée qui n'attira l'attention que de Yaröd apparut plusieurs mètres plus loin.

- Tu as mis du temps alors que tu n'as tué personne. Bien, il est temps d'y remédier.

Maylemis était assise, dos à Yaröd. Elle ne bougea pas et ajouta:

- Je t'ai fais venir ici afin que tu deviennes plus fort, ce pour quoi tu es né. Tu t'entrainneras ici, et puis tu partiras car tes adversaires doivent être plus importants que de simple elfes noires, orks ou autre... Tu dois viser plus haut.

La mort vivante fit une légère pause et reprit:

- Je te souhaite donc la bienvenue dans ce lieu de passage non pas de l'âme mais du corps. Car tu as raison, c'est ici la fin d'une vie, de la tienne, et le départ d'une nouvelle qui ne peut être que meilleure pour toi. Ne me pose aucune question, choisis ta proie... Ne l'attaque pas tout de suite.

A peine eut-elle finit sa phrase que Yaröd semblait choqué, comme si dans son intimité il venait d'être extirpé, trahison blasphématoire de son lui intérieur. Le cœur du Lycan battait de plus en plus vite, ses poings se serraient et de toutes les réactions possibles la seule qui arriva au visage de Yaröd fut celle que quiconque exprimerait face à un affront suprême.

- Ne recommence plus jamais ça ! Sans qu'ils soient dans la lumière faible du jour les yeux de Yaröd développaient pourtant autour d'eux comme une aura menaçante symbole de toute la frénésie meurtrière qui animait alors cet être à la frontière de la bête.

Sans chercher à comprendre plus, le Lycan sous l'effet d'une colère et rage intenses se dirigea non pas vers un des guerriers présent mais plutôt vers l'adolescent Elfe noir venu regarder son père ou du moins celui de sa race se battre comme dans une démonstration de ses talents.

Brisons le moral du fils ou de l'élève avant de s'attaquer à son maître !

Yaröd était hors de lui, c'était exactement l'effet voulu. Maylemis ne bougeait pas, comme si elle pouvait voir ce qu'il se passait malgré le fait qu'elle était dos à la seine.

- Très bien, si tu veux faire du mal, attaque l'élève d'abord pour faire sortir la rage du père. En revanche si tu veux lire la peur dans les yeux de ta victime, attaque le père, l'enfant ne bougera pas. Dans le premier cas, prépare toi, la rage est interessante à combattre mais dangereuse car imprévisible...

Maylemis sourit, inspira et chuchotta, comme pour insufler encore un peu plus de force à Yaröd:

- J'ai confiance, tu y parviendras.

Ancré dans sa rage et sa colère, le cœur qui de nouveau oblitérait sa poitrine. Les pas du Lycan devinrent beaucoup plus pressés faisant ainsi s'abattre sur ses épaules la lourde capuche de son manteau dévoilant ainsi des yeux injectés de sang.

Contemplez la puissance de Pyros et voyez en ma personne le bras incarné de la mort elle même !

C'est alors et supposé contre l'attente de la défunte que Yaröd déploya toute sa puissance dans ce qui le caractérisait dans une race de tueurs nés. Comme dans un flash invisible l'être qui autrefois avait l'apparence d'un Humain arborait dorénavant une musculature impressionnante, des griffes tranchantes, des crocs dégoulinant de baves et une fourrure marron aux reflets argentées. La bête, sortie de sa cage, donna à son bras un élan tel qu'à moins d'un miracle la tête de l'adolescent exploserait sous la violence titanesque du coup.

Maylemis avait enfin bougé. En effet, Yaröd l'avait surprise, ce qui était assez rare pour quelqu'un comme elle. A la vue du nouveau Yaröd, elle savait très bien que les guerriers présents ne résisteraient pas à l'envie de se mêler au combat, surtout celui qui se trouvait un peu plus loin derrière le père et son fils. Père qui avait vu Yaröd et dont les yeux s'étaient emplis à la fois d'inquiétude pour son fils mais aussi de haine envers l'attaquant.

En moins de temps qu'il n'en faut pour le dire, le père poussa son fils d'un geste puissant afin de le mettre à l'écart de l'attaque directe du lycan. Attaque qu'il prit de plein fouet. Le père fut envoyé au sol. La réaction du guerrier redouté par Maylemis arriva. Le père se relevait et allait attaquer. Au même moment, le guerrier s'approchait assoiffé de combattre.

La mort vivante fit un pas en avant mais un bras puissant l'arrêta. Maylemis fixa le nouvel arrivant d'un ton argneux et interrogateur à la fois.

- Il n'est pas pret! Tu m'as demandé de l'entrainer c'est ce que je fais. Tu m'as demandé de ne pas le tuer, c'est ce que j'essayais de faire!

L'homme sous sa longue cape ne détourna pas les yeux de la scène.

- Voyons comme il s'en sort. Il est plus doué que tu ne le crois, Maylemis... Tu as déclenché sa rage, décuplant ainsi sa force, c'est ce que je voulais.

Dressé comme l'arbre au centre de l'ouragan, Yaröd tentait de contenir les vagues intenses de violences qui animaient à la fois ses pensées et ses actes. Lui qui pensait que sur la terre des Morts personne ne se soucierait de lui, il avait tort, toujours ce Lycan qui disait en savoir plus que quiconque sur son existence. Combattre son passé était une chose très difficile mais pour le moment l'heure était au... massacre.

Je briserais leurs espoirs, je détruirais leurs rêves et je serais devenu leur cauchemar.

Yaröd se dressa de toute sa hauteur en bombant le torse, d'un souffle puissant il hurla comme le loup appelant sa proie à la prudence. Dans les instants infimes qui suivirent il s'accroupit pour dans une fulgurance massive se jeter sur le père fraichement remis de sa chute.

Le corps puissant de Yaröd fondait directement sur sa future victime. Maylemis était agacée, frustrée, elle allait quitter cette scène qui pour elle, ne finirait pas bien pour Yaröd, quand elle vit tressaillir légèrement les lèvres du nouveau venu.
Elle s'approcha et lui chuchotta:

- Tu incante? Que fais-tu? Leyrohm?

Soudain, le temps sembla se figer quelques secondes, le dénommé Leyrohm, fixa Maylemis.

- Je lui insufle une force nouvelle, un soupçon de ruse, assez de malice et d'agilité dans ce corps empli de haine et de puissance purement physique. En attendant, tais mon nom, je ne sais s'il est capable de s'en souvenir

Malgré sa colère, les mots du Lycan s'insinuèrent peu à peu dans l'esprit de Yaröd même si ces même mots s'étaient voulus des plus discrets possibles...

Une sensation étrange gagna alors Yaröd, comme si quelqu'un ou quelque chose guidait ses pensées vers une sorte d'apogée entre la violence haineuse de son être et le sadisme enfoui de son âme.
Lancé de toute sa force sur le père de l'adolescent il ne ressentait plus rien, ni douleur ni bonheur juste une soif insatiable de sang.

Pauvre fou goûte à la rage de Nargle !

D'un violent coup la patte velue de Yaröd traversa l'abdomen du père qui retomba au sol mort par éviscération. Puis calmement il se dirigea vers le jeune adolescent, en larme devant la dépouille de son père.

- Laisse moi te délivrer de ta triste existence !

Un geste rapide, un cri et un nouveau corps souilla le sol d'un sang nauséabond. Le Lycan était debout, entouré des quelques soldats qui voulaient se battre pour le punir des meurttres qu'il venait de commetre. Cependant il restait là fixe en regardant Maylemis et son étrange interlocuteur.

- Ne doutez plus jamais de moi !

A la vue du Lycan, les yeux de Leyrohm brillèrent d'un intêret nouveau et inquantifiable.

Tu es doté d'une immense force. Si seulement tu la maitrisais un peu plus... Lorsque tu la canaliseras, tu seras pret à suivre ton destin, c'est écrit. Ce sera toi.

- Tu es trop intellectuel, trop... Spirituel! Sors de tes pensées. Il est des moments où agir est la seule solution. Alors laisse moi faire, malgré sa force, il se fera tuer si je n'agis pas. Ecoutes moi et permets moi d'effacer toutes traces de ce... litige...

Leyrohm regarda Maylemis, puis Yaröd au centre des soldats.

- Bien, fais vite. D'autres soldats ne vont pas tarder à arriver, c'est l'heure pour eux de quitter leurs viles occupations et de venir ici. Rejoins nous. Tu nous trouveras, je te fais confiance.

Leyrohm s'approcha de Yaröd et l'invita à le suivre, il posa la main sur un de ses bras et plonge son regard dans celui du Lycan.

- Suis-moi, tu veux. Il est temps de nous retirer. Allons à la sortie d'Abyss, il faut que je te parle.

Au sol des petites gouttes de sang coloraient les rares dalles détruites du cimetière, la patte de Yaröd encore ensanglantée tremblait de convulsion sous l'impulsion de l'adrénaline.

Il faut que la bête s'endorme... TUER ! Non, du contrôle... encore du sang, j'ai soif...

Un chaos puissant agitait les pensées du Lycan qui poussa un rugissement bestial juste avant de laisser à la brume noire le temps de lui offrir sa forme humaine.
Ayant perdu de vu l'étrange individu Yaröd décida qu'il était bien avisé de fuir ce lieu vers la porte de la ville. Au pas de course il quitta le cimetière...